Ma Bro Ar C'Hap Gwechall suite 9
9- Le petit train : Train Youtar-
( références : quand brinquebalait le train youtar de Serge Duigou- Documentation privée J.S)
Inauguré le 28 janvier 1894, le petit train d’AUDIERNE, baptisé « train youtar » a quitté la scène le 31 décembre 1938, après 44 années de bons et loyaux services. Il a retrouvé une petite activité pendant la guerre de 39/45, au profit des troupes allemandes qui construisaient le mur de l’Atlantique. Le petit train servait au transport des matériaux de construction, particulièrement le ciment. L’arrêt définitif fut effectif le 30 décembre 1946. Il faut donc aujourd’hui être presque septuagénaire pour avoir connu le petit train. C’est largement mon cas, ce qui me permet d’avoir des souvenirs personnels à ce sujet.
Ils remontent à la guerre, quand le ciment était introuvable. Or, dans les wagons, on trouvait toujours une poussière résiduelle de ciment, et même parfois des sacs crevés, accidentellement ou intentionnellement, chacun résistant à sa manière. Il suffisait alors de contourner les postes de garde pour échapper à la vue des sentinelles, de s’armer d’une pelle à charbon , d’un petit balai et d’un bon sac de toile puisque le plastique n’existait pas encore, pour faire une bonne récolte. Je rappelle d’ailleurs à cette occasion que le ciment était transporté à la Pointe du Raz, ou ailleurs, par des convois de tombereaux réquisitionnés dans les fermes du Cap. Combien de sacs de ciment sont ainsi tombés accidentellement de ces tombereaux, au profit de particuliers souhaitant rafistoler un mur ou effectuer de menus travaux. Ma mère en fut largement bénéficiaire, en échange de quelques cigarettes ou d’un verre de vin. Mais l’expression « tombé du camion », tellement à la mode aujourd’hui, n’était pas encore inventée. Quoiqu’il en soit, la récupération de ces sacs fut, une fois de plus, un acte de résistance pour lequel je ne fus pas décoré.
Le petit train ‘’youtar’’ (mangeur de bouillie), reliait donc AUDIERNE à DOUARNENEZ. (Son cousin, le train ‘’carottes’’, fit l’objet d’un projet initial pour relier PONT-L’ABBE à la Pointe du Raz, via PONT-CROIX, ESQUIBIEN, PRIMELIN, projet abandonné et réalisé plus tard seulement entre PONT-L’ABBE et PONT-CROIX).
Les principales gares ou haltes étaient AUDIERNE, PONT-CROIX, BEUZEC, POULLAN. On imagine sans peine la complexité du montage d’un tel dossier, au XIXème siècle. Il fallut 20 ans pour aboutir à l’inauguration, presque un quart de siècle.
Je renvoie à l’ouvrage de Serge Duigou pour connaître le détail des festivités et le menu du banquet servi aux autorités : Préfet, député (Monsieur Cosmao-Dumenez), conseiller général, inspecteur d’académie etc.. , qui se déroula à l’hôtel Batifoulier. Le gens de ma génération ont connu cet hôtel, exploité par la famille Lapous, sous le nom de ‘’hôtel du commerce’’. Je l’ai visité en 1950 , date à laquelle il existait encore. ( par ailleurs déjà cité à propos des hôtels de la Pointe du Raz – Aujourd’hui, on trouve au rez de chaussée, un magasin de chaussures) .
A cette époque, l’amitié franco-russe battait son plein. Le jour de l’inauguration, les quais d’AUDIERNE s’ornaient de mâts arborant les drapeaux français et russes. Selon un chroniqueur de presse du journal Ouest-France (A. Claquin), la fanfare de DOUARNENEZ a même interprété l’hymne russe à l’arrivée du train inaugural en gare d’AUDIERNE. C’est à l’issue d’un banquet pantagruélique comme on n’en fait plus, que le maire d’AUDIERNE : Monsieur Amédée de Lecluze-Trévoédal a prononcé la phrase célèbre :
« Enfin, nous voici reliés, grâce à la ligne, au monde civilisé ».
Propos prémonitoire ! Le train ‘’youtar’’ reliait donc AUDIERNE à DOUARNENEZ, et servait au transport du poisson et des marchandises diverses. L’usine à soude (sera évoquée plus loin) se trouvait près près de la voie ferrée, et la présence de la gare favorisa la création de nouveaux commerces, dont 2 cafés situés à l’actuel emplacement de l’hôtel des voyageurs. La création de l’hôtel de voyageurs n’est pas directement liée à la naissance de la gare. La saga des hôtels fait partie de l’histoire locale. Je l’ai déjà dit à propos de la Pointe du Raz. C’est pourquoi je précise que Monsieur Brénéol, père de la propriétaire actuelle ‘’des voyageurs’’ a acquis les commerces existants pour en faire un hôtel, successivement en 1919 et 1921. Les hôtels, précurseurs des structures touristiques actuelles étaient d’ailleurs souvent une affaire de famille : ma famille en a créé 3, les familles Le Bour et Lapous 2 chacune et la famille Brénéol 2. Les vieux Capistes se souviennent en effet du restaurant qui portait leur nom : restaurant des Capistes appartenant à Gaïd Brénéol, sœur du premier propriétaire ‘’des voyageurs’’. Ce restaurant se situait place Gambetta avant la banque CMB. Enfin, pour compléter les anecdotes, je signale que le boqueteau situé derrière l’hôtel des voyageurs figure dans un titre de propriété sous l’appellation ‘’Bois de Prusse’’ Les amateurs de toponymie trouveront sans aucun doute une explication à cette dénomination.
Aujourd’hui, la gare a disparu au profit de constructions nouvelles. L’usine à soude aussi. L’hôtel des voyageurs est fermé, et le petit train fait partie des souvenirs . Alors souvenons nous
Le parcours total de 22 kilomètres s’effectuait en 50 ou 55 minutes, ce qui est loin du TGV, et donna lieu à de nombreuses anecdotes, particulièrement dans la côte avant PONT-CROIX, près de Lespoul. Le cas échéant, les voyageurs devaient descendre pour alléger la charge, et permettre au train de reprendre son élan. De nombreux accidents, tels que suicides ou collisions aux passages à niveau non protégés, émaillèrent cette vie éphémère, sans oublier les plaintes pour enregistrement des bagages au milieu des flaques d’huile ou de saumure.
Non rentable, le petit train a été victime du transport routier, tant dans le domaine des passagers que celui des marchandises. Il n’est pas le seul. Le train DOUARNENEZ-QUIMPER ne survivra pas non plus.
Du train ‘’youtar’’, il ne reste qu’une belle promenade le long de la rivière Goyen, entre AUDIERNE et PONT-CROIX, là où se trouvait la voie ferrée, et la poésie des lieux. Il fait aussi partie des souvenirs des anciens et, à ce titre , méritait une petite mention dans cette évocation du passé.
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L’ ENSEIGNEMENT-
Encore un sujet à part entière que je vais effleurer dans un chapître. Ecole publique, école privée (ou libre), les deux systèmes cohabitent en Bretagne. Le Cap-Sizun n’échappe pas à cette cohabitation, et chaque système a ses fidèles et ses inconditionnels, même si aujourd’hui on ne parle plus exactement de guerre scolaire. Je serai donc amené à traiter successivement après un bref rappel de quelques dates et un non moins bref historique : la rivalité des écoles, les frères de Ploërmel et le petit séminaire de PONT-CROIX, tous ces éléments concernant le Cap à différents degrés.
1- Rappel de quelques dates-
- Fin du Moyen-Age et Ancien régime : Naissance de la scolarisation
- XVIème siècle : à partir du concile de Trente : écoles de charité ( paroisses urbaines)
- XVIème et XVIIème siècles : essor de l’école urbaine et rurale ( en 1700, création des premières écoles modernes par Jean Baptiste de la Salle
Création des écoles religieuses tenues par les curés
Création des collèges tenus par les congrégations
- 1791 : loi supprimant les congrégations
- 1795 : le directoire reconnaît la liberté d’enseigner
- 1816 : les communes sont tenues d’entretenir une école et d’assurer la gratuité pour les indigents
- 1828 : ordonnances-expulsion des Jésuites- interdiction de préparer au baccalauréat
- 1831 : constat par Guezno à AUDIERNE : 600 enfants des 2 sexes ne sont pas instruits
- 1833 : loi Guizot : liberté de l’enseignement primaire – rôle de surveillant du curé
- 1850 – loi Falloux : liberté de l’enseignement secondaire – Très favorable à l’église, cette loi est combattue entre autres par Victor Hugo
- 1867 : loi Victor Duruy : une école de filles est obligatoire dans les villes de plus de 500 habitants
- 1867 : création de l’école normale de garçons à QUIMPER – elle est initialement dirigée par des congréganistes
- 1879 : loi obligeant les départements à entretenir une école normale d’institutrices
- 1881 : gratuité des écoles publiques primaires (en 1880, l’enseignement était gratuit à seulement 50%)
- 1882 : loi Jules Ferry : enseignement primaire obligatoire et laïque de 7 à 13 ans- certificat d’études obligatoire- suppression de l’instruction religieuse
- 1885 : création école de GOULIEN
- 1886 : loi René Goblet : organisation générale de l’enseignement primaire – laïcisation du personnel
- 1889 : loi sur les dépenses de l’enseignement primaire – instituteurs payés par l’état
- 1903 ( 18 mars) : dissolution de toutes les congrégations – sont concernées localement : à PONT-L’ABBE , frères de Saint Gabriel (dont la maison mère est à Saint Laurent sur Sèvre) – frères de Ploërmel ( Ils feront l’objet d’un chapître en raison de leur présence à DOUARNENEZ et plus tard à AUDIERNE) – Sœurs du Saint Esprit (maison mère à SAINT BRIEUC . Je les ai déjà été citées à propos des épidémies)
- 1904 : loi interdisant l’enseignement aux congrégations (ministère Combes)
- 1905 : loi de séparation de l’église et de l’état (inventaires-suppression des petits séminaires à partir du 14/10/1906)
- 1907 : évacuation du petit séminaire de PONT-CROIX – intervention de la troupe
- 1977 : loi Guermeur ( François Mitterrand a voté contre)
2 – Historique-
Selon Daniel Bernard ( cf : monographie de Cleden, page 133), des petites écoles fonctionnaient dans la plupart des paroisses de Basse Bretagne au XVIème, XVIIème et XVIII ème siècle sous la direction du clergé (remarque personnelle : de nos jours, les écoles coraniques fonctionnent sous l’autorité des religieux musulmans Iman, Cadi ou Ayatollah- à titre de comparaison). Il existe une école à CLEDEN en 1498, ainsi qu’à GOULIEN et PRIMELIN. De l’examen des registres d’état civil et d’autres documents, il résulte que bon nombre d’habitants étaient pourvus d’une instruction élémentaire. En 1650, sur 80 actes de baptême à CLEDEN, on voit 11 fois la signature du père et 29 fois celle du parrain. En 1679, sur les 12 membres du général au conseil paroissial, 10 signent lisiblement (soit 110 ans avant la révolution). Plus tard, (page 135), en 1725, sur 90 actes de baptême figurent 51 signatures de père et 63 de parrains. Ainsi, près des 2/3 des pères de famille savent lire et écrire exactement 64 ans avant la révolution.
Daniel Bernard en conclut que pendant le XVIIIème siècle , il existait à CLEDEN plusieurs écoles disséminées dans la paroisse, et que ces écoles étaient régulièrement suivies par la majorité des garçons. Toutefois, en 1798, toutes les écoles du Cap-Sizun ont disparu, sauf celle de PONT-CROIX. Il attribue ce fait au trouble des parents suite aux dissensions religieuses et politiques.
L’école de CLEDEN est terminée en 1846 (39 ans avant Goulien), et une nouvelle école sera reconstruite en 1891. Si l’on prend la révolution comme référence, on constate donc que l’enseignement est une prérogative du clergé (avant et peu après).
Les affirmations de Daniel Bernard sont confirmées par la documentation du musée de TREGARVAN (l’école rurale en Bretagne par Pierre Moisset). Je cite :
« au XVIème siècle, la population rurale est pratiquement analphabète…….les diocèses créent des petites écoles » .
Cette domination du clergé, par l’enseignement et le savoir, permet de comprendre déjà que ce n’est pas de plein gré qu’il abandonnera ses prérogatives en la matière.
La guerre scolaire va naître parce que les catholiques nient qu’il puisse y avoir une morale en dehors de la religion. Les républicains soutiennent au contraire qu’il existe une morale sociale. Pour ma part je pense que la religion n’a pas l’exclusivité de la morale. Je consacrerai d’ailleurs un chapître à l’étude de cette religion. Ce sera l’occasion de revenir sur ce sujet. Mais je crois pouvoir déjà dire que s’il y avait exclusivité, je ferais partie des immoraux ou des amoraux puisque je n’ai jamais mis les pieds dans une école confessionnelle, en tant qu’élève.Le très célèbre ‘’cléricalisme léonard’’ n’est pas une exclusivité du Léon. Il s’est manifesté aussi en Cap-Sizun, dans sa forme la plus exacerbée de catholicisme bourgeois dans un pays pauvre. Ce catholicisme bourgeois antilibéralisme, antisocialisme va diviser les familles, les communes, et se manifester de différentes manières. C’est la guerre scolaire !
3 – La guerre scolaire -
Depuis Jules Ferry, l’enseignement public est laïque, gratuit et obligatoire. Il s’établit en concurrence de l’enseignement confessionnel qui est payant. Cela aboutit obligatoirement à ce que l’on pourrait appeler 2 types de clientèle, en fonction des opinions de la famille d’une part, de ses moyens matériels d’autre part. Avant Jules Ferry, l’enseignement confessionnel était pratiquement le seul ‘’sur le marché’’. Ce n’est pas de gaieté de cœur que ses membres voient arriver un rival laïque, neutre et républicain, qui va progressivement le rattraper, l’égaliser, et même le devancer, prouvant par là même que le théorème de Pythagore, la règle de l’accord du participe passé ou les problèmes de trains qui se croisent sans se rencontrer et des robinets remplissant des bassins perçés sont tout à fait dissociables de la religion comme le sont aussi les fables de La Fontaine et même les équations trigonométriques. On peut même ajouter qu’il n’y a pas de pédagogie particulière en matière de religion. La pédagogie est universelle.
Dans de nombreuses communes, 4 écoles primaires vont se trouver en présence : 2 pour les garçons (1 publique, 1 libre), 2 pour les filles (id°) . Il en sera de même pour les collèges dans certaines villes : AUDIERNE et PONT-CROIX par exemple. La situation n’a pas changé de nos jours, sauf que les établissements sont mixtes ; ainsi à AUDIERNE : école Pierre Le Lec laïque, école Sainte Anne libre, collège de Locquéran laïque, collège Saint Joseph libre. A PONT-CROIX école maternelle publique, école primaire publique, école maternelle Immaculée Conception libre, école primaire et collège Notre Dame de Roscudon libres. S’en suit un racolage des élèves pour concurrencer le voisin d’en face, qui n’est pas le fait du public, lequel est assuré de sa clientèle, celle qui recherche en priorité la gratuité quelles que soient par ailleurs ses idées en matière de religion. Chacun a ses arguments ; résultat, les camarades de jeu, les voisins, les cousins ne fréquentent pas la même école. Les moyens utilisés pour faire pression sur les parents ne font pas honneur à leurs utilisateurs. Ils sont la preuve de ce sectarisme que j’ai déjà dénoncé et qui perdure encore peut-être aujourd’hui (surtout en matière de politique). Je veux parler du refus d’absolution. Ceci est arrivé dans ma propre famille et je le raconte, sachant que je risque de déplaire. Mais j’ai déjà cité Boileau précédemment !!
Avant la guerre 39/45, le collège Saint-Joseph s’est ouvert à AUDIERNE. Mon père a d’ailleurs travaillé sur le chantier de construction en 1937. La paroisse était dirigée par Monsieur Prigent, recteur. Je fréquentais l’école publique depuis mon jeune âge : certificat d’études en 1941, diplôme de bourses en 1942. Mon père était décédé d’un accident du travail en 1941. Tous mes cousins de la branche maternelle étaient inscrits à Saint Jo. Sollicitée par le recteur qui lui proposait de me prendre gratuitement à l’école libre, ma mère n’a pas accepté pour 2 raisons : tout d’abord parce que la bourse n’était attribuée que pour des études en milieu laïque, ensuite parce que ma scolarité n’aurait été assurée que jusqu’à la classe de troisième. Certes, j’aurais pu être appelé à poursuivre des études, ce qui m’aurait dirigé vers le petit séminaire de PONT-CROIX, gratuitement peut-être dans la mesure où j’aurais pu présenter quelques symptômes d’une quelconque vocation religieuse, car le collège servait aussi de laboratoire pour détecter voire éveiller les appels à servir la religion. Bref !! Ce refus d’obéissance a entraîné pour ma mère un refus d’absolution dans le confessionnal du recteur. L’enfant que j’étais a été informé des faits par sa propre mère qui ne s’est pas révoltée sans pour autant subir.
Je crois pouvoir dire aujourd’hui que, devant cet excès de pouvoir d’un ministre de la religion, (donc lettré et tenu de montrer l’exemple), à l’égard d’une personne peu instruite et veuve, j’aurais par la suite refusé de fréquenter une école libre même en cas de revirement de ma mère . Mon cas n’est pas unique, mais c’est mon cas et c’est du vécu. !! Ce qui me permet aujourd’hui de penser, avec du recul, que les enfants sortants du système scolaire libre, confessionnel et payant, ne sont pas meilleurs que ceux qui sortent du système public, laïque et neutre. Et tant qu’à faire, j’ajoute que la pratique de la religion n’est pas incompatible avec la formation scolaire. Mais, je l’ai déjà dit, nous parlerons plus loin de religion, d’autant que les deux sont liés. Quoiqu’il en soit, il n’en faut sans doute pas plus pour devenir un inconditionnel du partage des pouvoirs spirituel et temporel, aucun des deux n’ayant d’ailleurs qualité pour dominer l’autre.
A chacun ses problèmes de conscience (nous allons y venir). Il n’en faut sans doute pas davantage non plus pour devenir ‘’anti-ceci’’ ou anti-cela’’. Ce n’est pas mon cas ; je m’attache toujours à essayer de distinguer le fond de la forme, tout comme l’esprit de la lettre. La religion est une chose. Elle ne se négocie pas puisqu’elle repose sur des critères d’appréciation et de conviction personnelles. Mais les ministres du culte, auxquels je reconnais un niveau d’entière responsabilité dans leur fonction, particulièrement par les temps qui courent, n’ont pas pour autant le droit d’utiliser la ‘’force de frappe’’ à l’égard des faibles, sauf à se voir discrédités et accusés d’intolérance. Il ne faut pas jeter l’anathème sur celui qui ne partage pas les idées.
J’ai vécu la répartition des enfants à l’église en fonction de l’école fréquentée. Lamentable, le mot n’est pas trop fort !! Ceux de ‘’l’école du Diable’’ donc les damnés, séparés de ceux de ‘’l’école du Bon Dieu’’, déjà angelots avant l’heure.Apparemment, l’histoire n’entérinera pas toujours les choses en l’état . Le Diable !! Les autres noms du diable ont été recensés par Annick Lamezec dans son ouvrage :’’Le Diable en Bretagne’’ publié aux éditions Skol Vreiz. Je renvoie donc à cet ouvrage pour apprendre que l’appellation la plus courante en Cap-Sizun serait ‘’Tonton Jean PÔL’’. J’avoue ne l’avoir jamais entendue, ne pas en connaîte l’origine et en prendre acte, tout simplement. Ailleurs, le diable se nomme ‘’Satann goz’’, le vieux Satan ou ‘’Cornik’’, le cornu, et bien d’autres noms.
Séparés par l’école, adversaires en sport et en bagarres locales, parfois ennemis au quotidien, les enfants se retrouvaient tout de même dans les patronages qui, dirigés par le clergé, donc d’obédience, respectaient l’innocence des enfants. La guerre scolaire s’est éteinte dans les Patros, tout au moins en ce qui concerne les enfants. Mais l’intolérance saura vite retrouver sa place dans la vie courante, à l’âge adulte. On pourra même parler de réseaux : commerçants, coiffeurs, médecins …etc. Etre de ‘’l’école du diable’’ signifie être de gauche, être de ‘’l’école du Bon Dieu’’ signifie être de droite. Faux, archi faux. C’est un cliché aussi faux que celui évoqué précédemment à propos des FFI et FTPF. De nombreux anciens élèves de l’école libre ne mettent plus les pieds dans une église et votent à gauche, tout comme des anciens élèves de l’école publique pratiquent une religion (Catholique en Cap-Sizun). Sont-ils pour autant systématiquement des électeurs de droite ? Il faudrait le prouver !
Les écoles doivent être neutres. C’est le cas de l’école laïque.Je n’ai jamais entendu dire qu’il s’y tenait des réunions politiques. Ce n’est pas le cas partout. Lors des élections cantonales de1985, l’école Saint Joseph d’AUDIERNE a servi de support à un candidat en mettant des locaux à sa disposition pour l’organisation de réunions préparatoires. L’encadrement du moment confondait peut-être engagement personnel et vocation ou engagement de l’établissement. Pourquoi pas, tant qu’à faire, fournir le matériel pédagogique pour la propagande ? Ils n’ont pas osé ? Mais, il est vrai que les associations de parents d’élèves de tous bords peuvent faire naître des vocations politiques. Ceci va me permettre d’aborder sans plus attendre le chapître consacré aux frères de PLOËRMEL, congrégation qui a fourni jusqu’à un passé très récent les enseignants des écoles libres de garçons dans le Cap et à DOUARNENEZ, alors que l’école libre de PONT-L’ABBE relève de la congrégation des frères de Saint GABRIEL [maison mère à Saint Laurent sur Sèvre, dont on voit la superbe basilique du XIXème siècle, (abritant le tombeau du Père de Monfort), en circulant en voiture entre NANTES et POITIERS . Le Pape Jean-Paul II a d’ailleurs été hébergé en ces lieux lors de sa visite en Bretagne en 1996].
Je ne veux pas passer sous silence la congrégation des ‘’Filles du Saint Esprit’’, maison mère à Saint-Brieuc. Les religieuses étaient chargées de l’instruction des filles en Cap Sizun ainsi que de la charité publique, au sens religieux du terme, puisqu’elles assuraient entre autres les soins à l’hospice d’AUDIERNE. Cet établissement provenait d’une donation faite par testament par une généreuse donatrice. Il a changé de vocation aujourd’hui, suite à des arrangements entre plusieurs parties prenantes et des arguties juridiques. Il me semble toutefois, après avoir examiné les documents auxquels j’ai pu avoir accès, que si la lettre du testament a pu être arrangée, l’esprit n’a sans doute pas été respecté, particulièrement en ce qui concerne la clause d’annulation et la vocation impérative de l’immeuble. Mais ceci est une autre affaire, et même sans doute une affaire de conscience. Je pense pour ma part, que les considérations économiques, quelles qu’elles soient, auraient dû s’effacer à la fois devant la lettre et l’esprit de ce qui a été écrit en 1880. Passons !!
Mais , l’histoire ou le hasard ont voulu mettre à ma disposition une documentation exceptionnelle, donc inconnue ou peu connue, concernant les Frères de PLOËRMEL. Je vais donc en parler avant d’aborder plus loin le petit séminaire de PONT-CROIX.
4- Les Frères de PLOËRMEL-
(documentation de référence : Les Bretons et Dieu-Ouest–France page 184 et documentation privée )
A suivre Ma Bro Ar C'Hap Gwechall- Suite 10